17oct 15

Prix Nobel, Bruxelles, Air France, MEDEF

Des arabes qui ne savent pas rester à leur place

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Pendant cette semaine où toute la bien-pensance et ses médias s’est déchaînée contre les syndicalistes, le prix Nobel de la paix a été attribué à un syndicat, la CGT tunisienne, membre du quartet constitué avec la ligue des droits de l’homme, le syndicat des avocats et des patrons de Tunisie. C’est à l’UGTT que l’on doit les initiatives qui ont permis à ce pays de sortir de la grave crise politique qu’y provoquait le gouvernement islamiste avec l’appui du PS local. Une cérémonie d’amitié s’est déroulée à l’Institut du Monde Arabe en présence des lauréats. Tous étaient là. Dont le secrétaire général de l’UGTT, Hocine Abassi, et la présidente du patronat tunisien !

Mais pas un média français ! Pas un seul représentant de la bande du « droit d’informer », des « impertinents » « éthiques » et tutti quanti. Il est vrai que ces Tunisiens sont des arabes ! Et musulmans de surcroît ! Mais ils ont fait triompher pacifiquement la démocratie, la laïcité de l’État et la liberté des femmes. Tout ça au lieu de s’en tenir au rôle qui leur est assigné au journal de vingt heures. Même pas des terroristes ! Et ils n’ont acheté aucune de nos armes entre deux séances de coups de fouets donnés à des blogueurs ou une crucifixion d’adolescent. Des arabes et des musulmans en réunion de prix Nobel de la paix, hommes et femmes sans ségrégation ! Bref, hors des cases prévues pour eux par les programmes officiels. C’est trop pour les médias français ! Joie cependant : Hollande les a reçus. Et comme ces gens sont, en plus, très polis, ils ont accepté l’invitation. Je crois qu’ils aiment la France. Ils ne la confondent pas avec son pitoyable représentant. Car ils auraient pu refuser l’invitation d’un homme qui donnait raison à leurs adversaires au moment où eux luttaient le dos au mur.

Un Mexicain sans sombrero sur le nez ?

Puis, le lendemain, je me trouvais le soir à la maison de l’Amérique latine où l’on recevait le Mexicain Andrés Manuel López Obrador, ancien candidat à la présidence de la République fédérale du Mexique. Cet homme n’appartient pas au courant classique de l’autre gauche latino-américaine. Mais je le respecte très profondément. Sa constance m’impressionne comme celle d’un maître en démocratie. Car AMLO (c’est comme ça qu’on résume son nom) a gagné deux fois l’élection présidentielle dans son pays et sa victoire lui a été volée deux fois par les maffieux qui gouvernent là-bas.

Le Mexique est un pays ultra-violent, le plus dangereux de l’Amérique latine, ses élections sont toutes truquées, la moitié de son territoire a été vendue en concession minière à l’étranger, les cartels de la drogue y règnent en maîtres partout. La liste des ultras-riches, dont le numéro mondial de cette catégorie, compte davantage de multi-milliardaires que la France. Mais on n’entend pas à propos du Mexique le millième des reproches qui se lisent à propos du Venezuela ou de l’Équateur.

Hollande a reçu le président fraudeur, Peña Nieto. Celui-ci lui a acheté quelques hélicoptères. Moins que promis en fait. Mais bon, Hollande l’a quand même décoré de la légion d’honneur. Il l’a félicité pour ses réformes et déclaré que la France avait besoin des mêmes. Beuark ! Pas un mot pour demander où sont passés les 43 étudiants disparus d’un coup récemment. Mes amis ont été seuls à aller traiter d’assassin face à face ce personnage. Bien sûr, Hollande n’a pas reçu AMLO. Pas assez pourri pour être fréquentable ? On s’en fout à vrai dire. AMLO continue à défendre la voie démocratique d’accès au pouvoir, à condamner toute violence contre les bourreurs d’urnes. Il est de nouveau candidat. Il est en tête des sondages. Evidemment aucun média français n’est venu à sa rencontre. Ce Mexicain-là non plus n’est pas dans la bonne case médiatique.

Bruxelles secrète : la soucoupe volante et ses pauvres.

Cette semaine, j’ai fait de nouveau l’aller-retour à Bruxelles pour la mini-session du Parlement européen. Sous la pluie glacée, la ville paraît plus sale qu’elle ne l’est déjà sous le soleil. Le Parlement est en travaux. Le système ubuesque des entrées dans la soucoupe volante est rendu plus kafkaïen qu’à l’habitude. Mais comme le plafond de l’hémicycle a déjà failli tomber sur nos têtes, je ne discute pas l’opportunité des travaux, cela va de soi. À mon avis, pendant la période où on cherche à rendre non dangereux ce bâtiment, on ferait mieux de ne se réunir qu’à Strasbourg seulement pour éviter la transhumance coutumière entre la bourgade belge et le siège historique de « l’Europe de la paix bla bla…».

En tous cas, Bruxelles est toujours pire que ce qui se voit. Même en dehors de la mascarade européenne. Car la vitrine de l’Union Européenne est bien à l’image de cette institution cruelle et socialement malfaisante. Sur le papier, Bruxelles, c’est une ville très riche. En 2013, le produit intérieur brut de la ville a été de 61 899 euros « par habitant » tandis que la Wallonie francophone ne parvenait qu’à 26 183 euros et que la Flandre, si séparatiste, ne s’octroyait que 35 922 euros. Evidemment il s’agit de données qui n’ont aucun sens réel. Chaque habitant de Bruxelles ne reçoit pas une telle somme (ni d’ailleurs ceux de Wallonie ou de Flandres !). C’est même tout le contraire !

Bruxelles est surtout un petit enfer social. Entre 26,7% et 35,1 % de sa population vit en-dessous du seuil de pauvreté. Un quart des enfants bruxellois de moins de 18 ans vit dans un foyer sans revenu du travail. À cette violence invisible s’ajoute une violence mortelle. En effet, l’espérance de vie diminue avec la fortune des habitants. C’est ce que montre l’étude par quartier réalisée par l’Observatoire de la santé et du social qui publie ce baromètre annuel. En effet, la différence entre les plus pauvres et les plus riches retire aux premiers 2,9 années pour les hommes et 2,5 pour les femmes. Cette ségrégation sociale face aux droits élémentaires de l’existence et devant la mort est une bonne illustration de cette mystification qu’est « l’Europe qui nous protège ». Bruxelles est une capitale qui ressemble à ce qu’était le tiers monde. Je veux dire le tiers monde avant qu’il ne commence à se développer. Car pendant ce temps, l’Europe régressait grâce aux bienfaits de l’euro fort et de la « concurrence libre et non faussée ». La vitrine de l’Europe est bien à son image.

La violence des bienpensants

Combien de médiacrates ont dénoncé sans scrupules la « violence ouvrière » à Air France. Mais combien ont parlé de la violence patronale contre les travailleurs. Il a fallu le courage et la dignité de Xavier Mathieu sur Canal+ pour entendre une parole de vérité venue du terrain plutôt que les récitations outragées des lecteurs de prompteurs médiatiques. Puis il a fallu le courage de ce salarié des chantiers navals de Saint-Nazaire refusant de serrer la main de François Hollande pour que la situation sociale commence à faire parler dans les salles de rédaction. En tous cas, la réaction de ce syndicaliste de Saint-Nazaire prouve que chacun sait parfaitement à quoi s’en tenir. En refusant de serrer la main au président de la République, il agit comme j’ai proposé qu’on le fasse fait le matin même à la radio en disant aux salariés de « recommencer ». Ce syndicaliste et moi, chacun dans notre rôle et avec nos méthodes, encourageons ceux qui nous écoutent à relever la tête, à ne plus avoir peur, à ne pas se laisser faire, à résister. Tout le monde doit comprendre que « jouer le jeu », « la réforme » et « le dialogue social » tels que les pratiquent les donneurs de leçons des médias, du patronat et du PS c’est accepter d’être trompés, volés, et pour finir humiliés. C’est se faire détruire avec le sourire. Partout où on le peut, il faut poser des actes symboliques qui détraquent les belles machines à faire des images conformes, du politiquement digestible, de l’image pour madame Le Pen et les frères siamois du PS et de l’UMP.

L’épisode « Air France » est un révélateur. Il dessine crument un paysage en noir et blanc. Chacun voit la brutalité des partis officiels pour les salariés menacés de licenciement. Du coup, chacun constate le décalage avec la complaisance dont bénéficient en revanche les autres membres de la caste. Le Premier ministre a usé des mots les plus durs qui lui venaient à l’esprit à l’égard des salariés d’Air France. Véritable garde chiourme de la direction d’Air France groupée autour de lui pour l’image, il a aboyé à pleins poumons. Comment a–t-il pu croire que cela marcherait ? Que personne ne s’indignerait de le voir dans ce rôle ? Car chacun sait qu’on ne l’a jamais entendu dire que M. Cahuzac était un « voyou ». C’était son collègue de gouvernement. Pourtant c’était un « voyou » ! Il mentait et volait le fisc alors même qu’il était responsable de l’administration des Finances de notre pays. Mais il replantait des cheveux sur la tête des déplumés fortunés. Hum, qui par exemple ? En tous cas c’était son métier. Et cet argent, il le sortait sur des comptes à l’étranger ? Mais qui le lui donnait ? Les cheveux implantés… c’était de l’argent déclaré, ou bien c’était « au noir » ? Vous ne le saurez pas. Pas de garde à vue à six heures du matin, pas de prolongation de la garde à vue « pour poursuivre les investigations » ! Et plus d’un mois pour être mis à pied de son job de ministre, et encore bien des semaines avant d’être obligé de démissionner de celui de député !

L’affaire Air France c’est aussi un révélateur de l’attitude de Marine Le Pen. Quand le cirque médiatique s’est mis en mouvement contre les travailleurs en lutte pour leur droit à la survie, Marine Le Pen a joint sa voix à la meute des aboyeurs. Elle a été le bon caniche des licencieurs. Dès le jour de l’interruption du comité central d’entreprise d’Air France, le Front national dénonçait « l’agression ce jour de membres de la direction d’Air France » parlant d’un « acte aussi inadmissible que condamnable ». Le jour de l’arrestation des salariés soupçonnés, le vice-président du FN Florian Philippot se félicitait de l’arrestation à 6 heures du matin. Il ne trouvait pas du tout insupportable l’humiliation infligée aux salariés. On comprend la gêne de madame Le Pen. Les salariés d’Air-France ont permis qu’on parle de la question sociale en France. Tant de jours et d’heures sans entendre les refrains sur les musulmans et les migrants et le reste du menu quotidien imposé dans les médias lepénisés ! Pendant une semaine, impossible de trouver un angle pour la remettre en selle : les médiacrates se tordaient les mains de frustration ! Pourtant, le Journal du dimanche avait fait fort avec ces « 30% de Français » (pas 30% des « sondés) prêts à voter pour le yéti de la politique française, là où cela fait 70 % de gens qui ne veulent pas d’elle ! Mais le titre choc et les ventes ont fait « pschitt ». D’abord parce que quatre ou cinq journaux ont déjà fait leur une avec cette « révélation ». Ensuite parce que le retour de la question sociale a purifié l’atmosphère médiatique pourrie qui règne dans notre pays depuis des mois.

Bref, nous avons vécu un grand moment d’éducation politique pour beaucoup de gens. Spontanément, ils n’aiment pas plus la violence que nous. Mais ils comprennent la réaction des salariés d’Air France et refusent de les condamner. Les honnêtes gens savent bien que les voyous ne sont pas ceux que désigne Manuel Valls. Les voyous ce sont les gouvernements, les actionnaires et les patrons responsables du record historique de chômage dans notre pays avec 6 millions de personnes inscrites à Pôle Emploi, dont près de 4 millions sans aucune activité. Les voyous, ce sont les responsables des 621 000 accidents du travail ayant entraîné un arrêt de travail en 2014. Les voyous ce sont les médiacrates qui poussent des cris d’horreur devant deux chemises arrachées mais se taisent avec ferveur face aux 530 accidents du travail mortels. Pourtant, c’est plus d’un mort par jour ; ça laisse de la marge pour réagir, s’indigner, faire jouer « le droit à l’information » et tous les autres Bla Bla de la caste, non ? Les voyous, ce sont les dirigeants de TEFAL qui, avec l’aide d’un procureur complaisant, poursuivent un salarié et une inspectrice du travail pour avoir révélé une alerte de la médecine du travail que le patron voulait cacher aux salariés concernés.

Dans ce genre de situations, il faut avoir les nerfs solides et ne pas avoir peur. La colère est la meilleure conseillère. Chaque fois que vous êtes confrontés à une prétendue violence ouvrière, souvenez-vous des Conti. Souvenez-vous du lynchage médiatique de l’ouvrier Xavier Mathieu au 20 heures de France 2. À l’époque David Pujadas lui demandait de condamner le renversement de quelques ordinateurs. Il exigeait des regrets, demandait si « la fin justifie les moyens ». Mais dans cette affaire, les voyous, ce n’étaient pas les salariés de Conti. C’était les patrons de Conti ! La justice a annulé cinq fois les licenciements, jugeant qu’ils n’étaient pas justifiés au regard de la situation de l’entreprise. Mais l’entreprise a fermé, 1200 personnes ont été licenciées et la victoire judiciaire ne leur rendra pas leur emploi. Elle ne leur rendra pas non plus leurs 5 camarades qui se sont suicidés. Elle ne reconstituera pas les 400 couples explosés par la dureté de la lutte puis du chômage. Dans cette affaire, la violence était totalement du côté des patrons voyous. Seront-ils sommés de s’expliquer au 20 heures ? David Pujadas leur demandera-t-il si « la fin justifie les moyens », c’est-à-dire si le taux de profit pour l’actionnaire justifiait d’avoir détruit 1200 vies et ravagés une région entière ? Tous ces arrogants exprimeront-ils ces « regrets », ces « condamnations » qu’ils ont l’insolence de nous demander ?

Et à Air France, interrogera-t-on le PDG sur ses propos indignes et si extrêmement violents ? Une petite vidéo circule sur internet. On y voit Alexandre de Juniac, PDG d’Air France s’exprimer en toute liberté dans une assemblée de patrons en décembre 2014. Il critique l’interdiction du travail des enfants. Il dénonce les 35h et le principe même de temps de travail s’interrogeant faussement : « la durée du temps de travail, qu’est-ce que cela veut dire pour un ingénieur qui a une tablette et un smartphone et qui travaille chez lui ? ». Il veut supprimer le principe d’un âge légal permettant de partir à la retraite. Et il se fait applaudir par les patrons en citant son homologue de Qatar Airways racontant qu’au Qatar, les grévistes seraient « envoyés en prison ». Les autres bouffis présents dans la salle se marrent comme des hyènes ! Qui dénoncera cette violence en gants blancs, prononcés à mots feutrés dans les colloques patronaux de l’Abbaye de Royaumont ?

La mise en scène de l’arrestation des salariés d’Air France n’est pas due au hasard. Elle s’intègre dans un scenario bien précis. Décrédibiliser ceux qui résistent et faire peur pour décourager ceux qui voudraient les imiter. L’offensive anti-syndicale n’est pas nouvelle. Mais elle s’exprime à visage découvert ces jours-ci. Au point qu’une petite organisation patronale essaye d’en profiter pour faire parler d’elle en annonçant son intention de porter plainte contre moi. Evidemment cette plainte n’a aucune réalité. Elle n’existe pas juridiquement. Les bavards qui m’interrogent à son sujet ne se donnent même pas la peine de vérifier si l’association concernée existe. Mais tout cela permet à des médiacrates de me demander avec une mine grave « les patrons ont-ils peur ?»

Et dans l’ambiance du moment j’ai noté ce supplément économie du Figaro du mardi 13 octobre. Il s’agit d’un billet à propos du 120e anniversaire de la création de la CGT ces jours-ci. Le syndicat organise deux jours de rencontres et débats à Limoges, dans la ville où il a été fondé. L’éditorialiste Marc Landré commence son billet par les mots suivants : « retour sur les lieux du crime ». Oui, vous avez bien lu : le « crime ». La création d’une confédération des syndicats ouvriers en 1895 étaient « un crime » ! Les mots ont-ils un sens pour les médiacrates ? Imaginez qu’on commence un papier à propos d’une assemblée du MEDEF en parlant d’une réunion de « suceurs de sang ». On devine les glapissements de la caste ! Lutter contre le travail des enfants à partir de 12 ans, vouloir des journées de travail de moins de 10 heures, exiger que tous les salariés puissent avoir un jour commun de repos, voilà ce qui était à l’origine du « crime » que raille l’éditorialiste du Figaro ! Car c’est toutes ces choses que la CGT demandait à sa création et c’est toujours avec le même esprit qu’elle agit, comme le font les autres syndicats de salariés issues du mouvement ouvrier.

Dans cette séquence, on aura retrouvé les figures désormais classiques de la surenchère anti sociale dont le PS est désormais le déclencheur. Car quand Manuel Valls traite les salariés de voyous, quel espace laisse-t-il à la droite ? Que pouvait-elle dire pour récupérer son rôle sur la scène ? Il faut pourtant bien qu’elle se distingue ! Et pour cela, elle doit en rajouter. Ainsi le PS solférinien libère la parole des plus réactionnaires. Voyez Laurent Wauquiez, secrétaire-général du parti de Nicolas Sarkozy. Il a déclaré « Il y a trop de syndicats en France qui font du blocage, des syndicats qui ne représentent plus qu’eux-mêmes et qui sont hostiles à toute forme de changement. (…) Et cela ça paralyse notre pays ». Personne ne réplique. C’est pourtant facile à faire. Car « not’bon maître » doit encore apprendre que les syndicats représentent bien plus de monde que son petit parti de carriéristes haineux. Les syndicats français regroupent deux millions de syndiqués. La seule CGT compte environ 650 000 adhérents. C’est quatre fois plus que le parti Sarkozyste « les Républicains » qui n’en compte que 180 000. Il y a dix ans, M. Wauquiez aurait été écrasé sous les lazzis. Grâce aux préparations de l’artillerie solférinienne la droite peut se déboutonner sans risque.

Le MEDEF : un groupuscule nullement représentatif

Ceux qui ne représentent qu’eux-mêmes, c’est le MEDEF ! J’ai traité le thème dans ma campagne présidentielle de 2012. On avait bien préparé l’argumentaire et j’ai déroulé mon raisonnement avec gourmandise, ce soir-là, à la tribune de Montluçon. La bande des « journalistes » qui me suivaient avec le seul but de me nuire en fabricant des buzz de circonstances aurait pu faire son numéro habituel « Melenchon éructe ses insultes contre le patronat et invective les entreprises ». Rien. Le sujet est tabou. Vous ne trouverez jamais nulle part une ligne sur le sujet, un documentaire, une « enquête de terrain », ni aucun des Bla Bla qui servent d’habitude pour « enquêter », « révéler », comme sur des sujets aussi importants que « islam et banlieue », « peut-on porter une kippa dans la rue ? », « doit on servir de la viande halal à la cantine ? », « islam et République» et autres grands thèmes des médias français.

Le Medef est une organisation dont l’existence même devrait être interpellée. Car qu’est-ce que le « patronat » français ? Est-on sûr qu’existe bien une catégorie sociale qui commence avec des auto-entrepreneurs à 1 000 euros par mois et comporte des salaires comme celui de Carlos Gonsh ? La preuve que rien n’est moins certain, c’est qu’il n’y a aucune élection organisée en France pour juger la représentativité des différentes organisations patronales ! Les syndicats de salariés sont, eux, soumis à des élections professionnelles tous les quatre ans. Un syndicat doit obtenir au moins 10% des voix dans l’entreprise et 8% au niveau de la branche ou au niveau national pour pouvoir négocier et signer des accords. Car il y en a plusieurs ! Le patronat a été exempté par l'UMP de la réforme de la représentativité des syndicats de 2008. Nous vivons désormais sous le régime d’un patronat de droit divin, qui n’a jamais à faire la preuve de sa représentativité. La question de la représentativité patronale est une zone de non droit. L'État reconnaît arbitrairement trois organisations « représentatives » (MEDEF, CGPME, UPA) sans aucun vote d’aucune sorte. Ces 3 organisations se partagent ainsi 700 000 mandats dans les organismes sociaux, sans aucune élection.

Pourtant, à peine 8% des entreprises sont membres d'une des trois organisations patronales reconnues (MEDEF, CGPME, UPA) selon une étude de la libérale Fondation Concorde de 2011. Et parmi ces trois organisations reconnues comme représentative, les gouvernements ont systématiquement tendance à donner une place prépondérante au MEDEF au détriment des patrons de petites entreprises de la CGPME et encore plus au détriment des artisans de l’UPA. Je ne dis pas qu’il est plus facile de négocier avec ces deux organisations qu’avec le MEDEF. Mais au moins représentent-elles des chefs d’entreprises qui travaillent réellement et ne se contentent pas de défendre les intérêts des actionnaires du CAC40 comme le MEDEF.

Le MEDEF est une coquille vide. Il prétend avoir 750 000 adhérents sur plus de 3 millions d'entreprises recensées par l'INSEE. Mais ce chiffre est très largement surévalué. Michel Offerlé, politiste à l'Ecole normale supérieure, a croisé les annuaires du MEDEF et les données de l'INSEE. Selon ses calculs, le MEDEF représente à peine entre 3% et 10% des employeurs du pays. Il compterait entre 111 000 et 334 000 adhérents.

Des pans entiers de l'économie ne sont pas représentés par le MEDEF ni par les deux autres organisations patronales prétendument représentatives. C’est par exemple le cas des professions libérales (avocats, médecins…). Elles représentent pourtant près d’une « entreprise » sur quatre en France et embauchent de nombreux collaborateurs, secrétaires etc. Il en va de même des entreprises de l'économie sociale : ces 800 000 entreprises coopératives, mutuelles ou associations emploient 2 millions de salariés. Mais ces deux secteurs sont exclus de la représentativité patronale et ne peuvent participer aux négociations interprofessionnelles. Ceux qui veulent débattre de la représentativité des syndicats feraient mieux d’y réfléchir à deux fois. Nous y sommes prêts. Mais ce ne sont pas les syndicats de salariés qui ont le plus de souci à se faire !

D’ailleurs nous n’avons peur de personne. Et certainement pas de ceux qui veulent nous faire taire. Il paraît qu’un syndicat patronal a décidé de porter plainte contre moi. Il me reproche des « incitations à l'agression et un discours de haine, systématiquement dirigé contre les chefs d'entreprises » et considère que mes propos « nuisent à la sécurité des chefs d'entreprises ». Je ne crois pas que ces gens représentent grand monde. Les véritables chefs d’entreprises comprennent les salariés qui défendent becs et ongles leurs emplois. Ils savent y lire l’amour du travail bien fait et de l’entreprise comme collectif de travail. Ce syndicat essaye juste de faire sa publicité sur mon dos. Je le comprends. Comme le système de la représentativité des organisations patronales est totalement opaque et oligarchique, les petites organisations doivent redoubler d’effort pour exister. Mais cela n’excuse pas tout.

Cette organisation prétend représenter les patrons de très petites entreprises. Ils feraient mieux de réfléchir à mes propositions plutôt que de hurler avec les meutes des bien-pensants amis du CAC40. Combien de TPE du commerce ou du BTP se porteraient mieux avec la politique de relance de l’activité par la consommation populaire et l’investissement public que je propose ? Combien de TPE meurent étouffées par les banques et seraient bien contentes d’accéder à des crédits moins chers et plus faciles à obtenir auprès du pôle public bancaire que je propose de créer ? Combien de TPE se réjouiraient de bénéficier d’un escompte à 0% comme je l’ai proposé dans la campagne de 2012 ? Combien de TPE souffrent de la concurrence déloyale du système de travailleurs détachés contre lequel j’ai été le seul à voter au Parlement européen en 2014 ? Sur ces sujets, le patronat officiel est bien silencieux… Jusqu’à ce qu’un petit patron aille arracher sa chemise à son banquier ou au ministre de l’Économie ?


51 commentaires à “Des arabes qui ne savent pas rester à leur place”
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  1. Francis dit :

    Bravo pour l'émission sur Public Sénat. Clair et percutant. Ne parlons pas des questionneurs (euses) qui n'avaient rien à faire des réponses et reposaient 10 fois la même question sans même prendre la peine de la reformuler différemment.


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