L'argument de la semaine

G20 : une réunion de plus pour rien

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Les 18 et 19 février étaient réunis à Paris les ministres des finances et banquiers centraux des 20 pays les plus riches de la planète. Nicolas Sarkozy a affiché de vastes ambitions pour la présidence française du G20. Des ambitions qui se réduisent à une posture quand on les compare aux résultats insignifiants des réunions de cette instance.

Rappel des priorités de la présidence Sarkozy du G20

1.    Coordonner les politiques économiques et réduire les déséquilibres macroéconomiques mondiaux
2.    Renforcer la régulation financière
3.    Réformer le Système Monétaire International (SMI)
4.    Lutter contre la volatilité des prix des matières premières
5.    Améliorer la gouvernance mondiale
6.    Agir pour le développement et trouver des financements innovants (dont la taxation des transactions financières)

Les objectifs velléitaires et contradictoires de Sarkozy

-    Sarkozy n’a fait aucune annonce nouvelle dans son discours d’ouverture de la réunion du vendredi 18 février
Il en a rabattu sur la réforme du système monétaire internationale. Il a commencé par répéter de manière velléitaire que « la réforme de l'ordre monétaire international ne peut plus attendre ». Avant d’avouer : « Il ne s'agit pas de définir un nouvel ordre monétaire en un an. Il s’agit dans le domaine monétaire de se mettre d'accord en 2011 sur un programme de travail. » Donc, en résumé : on ne peut plus attendre mais on n’y parviendra pas en un an ! A l’image du G8 et du G20 jusqu’à maintenant, la présidence française du G20 est donc en train de se réduire à discuter sur ce dont on devrait discuter !

-    Il a répété sa volonté de renforcer encore le FMI :
« le FMI doit disposer de moyens et de pouvoirs de surveillance renforcés » « au cœur des priorité des la prés française, il y a clairement la volonté de rehausser le rôle du FMI, lieu de la coordination des politiques monétaires internationales »
Sarkozy a suggéré de réformer les statuts du Fonds, mais sans dire dans quel sens, et en restant donc silencieux sur le caractère non démocratique du FMI  et sa domination par les USA, seul pays à y disposer d’un droit de véto permanent.

-    Il a réaffirmé la préférence française pour une taxation des transactions financières.
Ce soutien à la Taxe Tobin est une posture car :
Cet objectif est totalement contradictoire avec celui de renforcer le pouvoir du FMI, puisque celui-ci est le principal opposant international à cette taxation, avec les USA et le Royaume-Uni. DSK n’a apporté aucune inflexion dans ce domaine : il est complètement aligné sur le point de vue anglo-saxon qui combat la Taxe Tobin comme une atteinte à la libre circulation des capitaux.
Sarkozy défend par ailleurs la liberté des capitaux : « il ne me vient pas à l'idée de contester les mécanismes de marché », après avoir déjà dit le 24 janvier que "la France n'est pas […] favorable au contrôle des capitaux".

La réunion des 18-19 février : une grand messe qui brasse du vent

55 hautes personnalités (20 ministres, 20 banquiers centraux + dirigeants d’organismes internationaux FMI, Banque mondiale, ONU, Commission européenne, BCE etc)
Plus de 500 participants au total avec les délégations.
700 journalistes. 3 millions d’euros de dépenses pour 1 jour et demi de réunion

La discussion n’a porté que sur un seul sujet, sur lequel elle s’est enlisée : la coordination macroéconomique et la réduction des déséquilibres macroéconomiques. Les ministres du G20 ont convenu de suivre en commun des indicateurs qui existaient déjà et qui d’ailleurs été déjà discutés dans les réunions du G20 :
-    Indicateurs internes : dette et déficits publics, dette privée et épargne
-    Indicateurs externes : soldes commerciaux et soldes des investissements qui constituent les balances des paiements

Ils ne sont pas parvenus à fixer des objectifs concernant le suivi de ces indicateurs et ont prévu de se fixer des grandes lignes directrices d’ici avril, mais de manière indicative, sans cibles chiffrées ou objectif contraignant. Cela ne représente aucune avancée particulière en termes de coordination.

Les indicateurs de taux de change, de taux d’intérêt et de réserve de change ne seront pas suivis en tant que tels car la Chine s’y est opposée, refusant de mettre en débat sa souveraineté monétaire.
Les déséquilibres macro-économiques sont conçus de manière très étroite, artificielle et libérale : aucun compte n’est tenu de l’impact macro-économique des taux de chômage, de pauvreté et de développement humain.

Une présidence Sarkozy qui ménage les USA

Les pays du G8, qui dominent le G20, ne cessent de pointer la Chine comme responsable des déséquilibres mondiaux en occultant la responsabilité des USA. C’est particulièrement malhonnête quand on sait que  crise de 2008-2009 est venue des USA et que la Chine a été un des principaux amortisseurs mondiaux de cette crise grâce à une politique de relance.

Dans sa conduite du G20, la présidence française épouse le consensus anti-chinois du G8. Avec le Canada (relais des USA) et l’Inde (rival historique de la Chine), elle a tenté en vain lors de la réunion des 18-19 février d’imposer le suivi d’indicateurs monétaires visant à contraindre la politique monétaire chinoise et à obtenir une réévaluation du yuan.

En matière de réforme du système monétaire international, la présidence française pointe en fait le yuan pour écarter tout débat sur le dollar. Dés le 24 janvier dernier Sarkozy avait annoncé la couleur : "La France ne souhaite pas remettre en cause le dollar […] qui joue un rôle éminent et doit être une monnaie forte.""Le dollar est et restera la devise prépondérante."



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