L'argument de la semaine

Ces 100 milliards que l’on peut récupérer sur le capital

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Dans une interview au Monde du 15 mai dernier, Patrick Artus (directeur des études économiques du groupe financier Natixis) a affirmé :  "Il faut aligner la taxation des revenus du capital sur celle du travail. Cela pourrait rapporter 100 milliards d'euros". D'où vient ce chiffre ? Quel est aujourd'hui l'écart de taxation entre capital et travail dans notre pays ?

Un écart de 24 points entre la taxation des revenus du capital et du travail

En 2009, le taux moyen de prélèvements était de 42 % sur les revenus du travail.
Cela incorpore toutes les cotisations sociales, tant patronales que salariales, ainsi que les impôts directs, principalement l’impôt sur le revenu et la CSG.

En 2009, le taux moyen de prélèvements était dans les faits de 18,3 % sur les revenus du capital.
L'Etat prélevait donc 87 milliards d'euros sur les 476 milliards de bénéfices, d’intérêts, de dividendes, et autres plus values mobilières (ventes d’actions) ou immobilières.

Si l’on appliquait donc le taux de 42 % aux revenus du capital, on obtiendrait 200 milliards, soit 113 milliards supplémentaires en plus des 87 milliards déjà récoltés.

Comment s'explique un tel écart de taxation ?

Dans les textes les revenus du capital sont principalement imposés par deux moyens :

  • l'impôt sur les sociétés dont le taux théorique de taxation des bénéfices est de 33,3 %
  • la taxation des dividendes versés aux actionnaires à hauteur de 30,1 % (18 % de prélèvement forfaitaire libératoire + 12,1 % de prélèvements sociaux notamment CSG / CRDS)

Dans la loi, la taxation à hauteur de 18,3 % n’existe pas. C'est un résultat constaté.
Il correspond en fait au montant des revenus du capital (476 milliards) divisé par ce que touchent réellement l’Etat et la Sécurité sociale (87 milliards).
L'écart de 12 points entre les taux apparents de taxation de 30,1 % et 33 % et le taux réel de taxation de 18,3 % est dû aux niches fiscales très favorables aux revenus de l’épargne et du capital.

Quelques exemples de niches fiscales sur les revenus du capital

  •  Exonération des plus-values de cession d'une entreprise individuelle ou d'une branche complète d'activité = perte de 20 milliards d'euros de recettes pour l'Etat.
  • Effets d'assiette de l'impôt sur les sociétés. Dans le calcul de l'impôt sur les sociétés, les entreprises peuvent faire échapper une grande partie de leurs bénéfices à la taxation, en particulier quand elles sont grandes. D'après la Cour des comptes, le taux d'imposition réel sur les sociétés (impôt sur les sociétés effectivement payés) est ainsi de 30% pour les entreprises de moins de neuf salariés. Et il n'est que de 8% pour les entreprises du CAC 40 qui sont pourtant les plus bénéficiaires. Le taux moyen d'imposition sur les bénéfices des entreprises françaises est de 18 %.

L'enjeu du rééquilibrage de la fiscalité du capital :

En alignant la taxation du capital sur celle du travail, on dégagerait des marges de manœuvre considérables. Les 100 milliards ainsi récupérés chaque année représenteraient 5 fois le déficit 2009 de la sécurité sociale, ou les 2/3 du déficit 2009 de l'Etat.



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