08déc 14

Stopper la reculade au point Macron

Ce billet a été lu 50  859 fois.

J’ai attendu pour poster ce billet que Valls ait parlé. Pfffff ! Un extraterrestre ! Dire que sa politique « combat l’inégalité » et que tous les moyens sont concentrés pour le développement de l’école, quel cynisme ! C’est tellement énorme ! C’est bien là toute la méthode mille fois démontrée du vol des mots. Je ne perdrai pas un instant à commenter ce numéro d’enfumage. D’ailleurs, au moment où ces lignes paraîtront, tout le monde aura oublié jusqu’au fait qu’il a parlé à la télévision. La honte dorénavant est là chaque jour. Hier, le président des droits de l’homme à géométrie variable faisait la manche au Kazakhstan. Déguisé en glace au café chantilly il s’est fait piéger comme un gamin. Personne n’aurait songé à faire ça à De Gaulle ou Mitterrand ! La veille, il avait accepté la pièce donnée par les Américains pour ne pas livrer les navires dus aux Russes. Non ! Pas en notre nom ! L’industrie de défense française envoie ainsi le pire des messages à ceux qui pensaient qu’en achetant français ils pourraient échapper à la main-mise des super puissances. Ainsi va la France. Pourtant, il ne faut rien lâcher. Notre inépuisable capacité à rester debout finira par rencontrer une opinion majoritaire. Un jour qui paraîtra soudain, la prise de conscience s’opèrera qu’il n’y a pas d’autre limite à la reculade des acquis sociaux que la résistance à la reculade.

Ce post évoque la question de la lutte sociale. Je propose que la loi Macron soit la cible sur laquelle concentrer toutes nos forces. Sur ce terrain si cruel pour des millions de salariés nous pouvons tenir une ligne de front. Nous pouvons faire stopper là, à cet endroit, les reculades sociales que le gouvernement de Hollande et de Valls organise.

Puis je reviens sur l’émission si révélatrice « Des paroles et des actes » qui nous a réunis Hamon, Dufflot et moi. Enfin je parle de l’ouverture de la plateforme de débats autogérés qui s’ouvre sur le site du Mouvement Sixième République

Union contre Macron et sa loi

L’urgent reste évidemment d’enrayer la résignation. C’est par là que commence la propagation mortelle des idées et valeurs de nos adversaires. Le recul des repères progressistes est l’écueil numéro un de notre situation. Il faut donc reconstruire la conscience qui se dilue. C’est dans la lutte que cela se fait. Des luttes, il y en a de tous côtés. Ni relayées, ni fédérées. Le moment viendra. Dans le cyberespace aussi, des milliers de contributions montrent que le froid n’a pas gagné la partie. De mon côté, sans m’illusionner, je note aussi que les réunions politiques de cette fin de trimestre sont bien fréquentées. C’est le cas en tous cas de celles que j’anime, même si je suis capable de faire la part des choses et de la curiosité qui se porte sur moi. Et alors ? N’est-ce pas de cette façon que les idées s’ouvrent des portes et des cœurs ? Notre devoir est de proposer un point d’appui, un motif qui concentre les raisons de se battre.

Telle est la loi Macron. Elle touche de nombreux domaines. Le nombre d’ignominie qu’elle contient, de secteurs qu’elle frappe, en fait le prototype d’un déclencheur capable de fédérer le peuple. Pour ce qui nous concerne à cet instant, concentrons sur le travail du dimanche et de la nuit, même si ce que je sais de cette loi à propos des apprentis ou de la médecine du travail a aussi de quoi faire hurler. Le travail du dimanche c’est celui du commerce, de la restauration et de métiers où il s’agit essentiellement de femmes au travail. C’est le royaume des petites payes et des situations précaires qui ne peuvent dire « non ». Un jour de plus sans les gosses. Un jour de plus les gosses tous seuls à la maison ? Un jour de plus levées tôt couchées tard ? Et ainsi de suite. La lutte contre le travail du dimanche est à la fois une lutte sociale et une lutte féministe. Ça se lit dans les statistiques. Ensuite, c’est une lutte fondamentale. Voyez si vous en avez le temps ce que je dis dans mon livre à propos de la « propriété du temps social ». Qui commande la synchronisation des temps sociaux commande la société toute entière ! Quel est le temps qui doit dominer ? Celui de la vie sociale libre dans le temps social libre commun à tous ou bien celle de la circulation de la marchandise ? Le travail du dimanche c’est la sur-exploitation non seulement des individus qui y sont contraints mais de toute la société réduite à sa fonction de consommation marchande.

Pour affronter la loi Macron, nous avons besoin d’une mobilisation de masse. D’après moi, c’est aux syndicats de l’organiser. Le mieux serait que ce soit dans l’unité. Mais comme nous ne nous mêlons pas de la stratégie des syndicats, nous croyons que c’est aux syndiqués de dire ce qu’ils croient juste de faire. Donc nous allons proposer l’idée d’une marche contre la loi Macron au collectif « Triple A ». C’est là que nous saurons si la mobilisation est possible et sous quelle forme. En effet, c’est là que se trouvent à la fois des associations, des syndicats et des partis. Nous pouvons mettre en échec cette loi. Déjà des socialistes se sont positionnés en faveur du vote contre la loi. Sur le plateau de France 2, Cécile Duflot en fait autant. Dans le Front de gauche, c’est l’unanimité sur le sujet. Un front extrêmement large peut donc se constituer. Un front du peuple. Un mouvement qui fédère le refus de nombreux secteurs concernés socialement mais aussi de vastes pans de la société qui récusent le modèle du tout marchand et du tout consommation.

« Des paroles et des actes » était attendu

Je l’ai préparé avec soin, croyez moi. Sachez aussi ceci. Dans chaque équipe politique représentée, la discussion avait été âpre pour savoir s’il fallait y aller ou pas. Dans mon cas, cette évaluation se complique du fait que je suis l’ancien candidat commun de neuf organisations et que je dois tenir compte de ce que je sais de leur façon de voir. Puis ce furent des heures de révision de nos chiffres et de préparation de nos positionnements. Peu de choses ont servi car le fil de l’émission s’est vite perdu. Celle-ci a cependant rassemblé 2,3 millions de téléspectateurs et généré 37 000 tweet. Le thème initial de l’invitation était de savoir si l’on pouvait passer de l’opposition à Hollande à une alternative commune de l’opposition de gauche. Ce cadre partait de l’existence d’une opposition de gauche. Peut-elle s’unir, quand bien même ce concept est très flou à présent ? Serais-je allé sur ce plateau si je pensais que c’était totalement impossible ? Parmi mes amis, notamment au Front de Gauche, les uns espèrent cette jonction. Les autres n’ont plus aucune confiance dans la vieille gauche officielle et redoutent que je paraisse englobé avec celle-ci. Je me devais de représenter ces deux points de vue que je crois légitimes.

Je sais que l’Histoire va bientôt se charger de trancher. Pour ma part j’ai la certitude que les socialistes des diverses variétés de « frondeurs » ne rompront pas les rangs. En dehors des « socialistes affligés » tous les autres groupes de dissidents restent très soucieux de bonne réputation interne. Ceux qui sont restés à table mangent. Un petit bout de pain pour finir le petit bout de fromage, puis un petit bout de fromage pour finir le petit bout de pain. Et ce sera le refrain : des départementales au congrès et du congrès aux régionales et de celles-ci aux primaires, ad nauseum ! Pour autant, je m’en serais voulu de laisser passer une occasion d’agir utilement, c’est-à-dire d’ouvrir la route à ceux qui veulent la prendre. Je voulais montrer combien ce n’est pas moi qui bloque la voie du regroupement.  

J’agis de cette façon, en acceptant un dialogue qui m’a été refusé des mois durant. Je le fais en pensant a ceux qui se disent « ça ne peut pas continuer comme c’est là ». C’est l’état d’urgence politique : notre pays va à l’abîme, l’Europe agonise, partout l’extrême droite est en dynamique, l’humanité est menacée de guerre généralisée et d’un désastre écologique majeur. On sait que « la catastrophe démocratique » en cours, comme dit Benoît Hamon, vient d’une politique économique austéritaire absurde. Le phénomène est général en Europe. L’extrême droite vient de renverser le gouvernement suédois. Elle est en tête au Danemark, elle culmine dans toute l’Europe du nord, l’ancien paradis social-démocrate. Le vieux « mouvement ouvrier » nordique a basculé dans le libéralisme. L’extrême droite capitalise ceux que la gauche officielle a expulsés de la vie sociale.

Dans ce contexte Cécile Duflot et Benoît Hamon ont fait tous les deux un constat d’échec à propos de François Hollande et Manuel Valls. Ils disent qu’il faut faire autre chose et autrement. Dès lors, on peut leur faire des reproches pour le passé récent mais il serait sectaire de les repousser quand ils semblent venir vers nous au moins en utilisant nos arguments. En préparant l’émission j’ai repéré les convergences fortes sur lesquelles je pouvais m’appuyer si le débat l’avait permis : la Sixième République, la demande de renégociations des traités européens, la transition écologique de l’économie, la fin de la précarité et de l’austérité, et, pour la paix, la sortie de l’Otan. Dès lors, je disposais de points d’appui pour avancer séance tenante si l’émission était restée centrée sur son objet. Ce ne fut pas le cas.

Cette soirée pouvait-elle être un commencement honnête, sans tentative pour me récupérer dans le système que je combats ? Je n’ai pas eu à le craindre. D’entrée de jeu, Benoît Hamon s’est placé en mode absent. Il a paru totalement paralysé par son impossibilité d’aller au bout de sa rupture avec Hollande et Valls. Il nous a récité le discours convenu et irréel de la « lutte pour la réussite du quinquennat » à laquelle lui-même ne croit pas. Il a même voulu valoriser les acquis du gouvernement en citant ses « réussites dans l’éducation nationale »… ce qui était hautement surréaliste et se passait de commentaires du fait de l’énormité ! En fait, il n’a rien d’autre à proposer que de nous demander de l’aider dans la préparation du prochain congrès du PS. Pauvre perspective pour le pays ! Ce n’est une perspective pour personne, et peut-être même pas pour les socialistes eux-mêmes. Ils pressentent combien la partie va être pré-arrangé par ses chefs. Hamon s’est donc isolé tout seul sur ce plateau et je crois qu’il l’a fait volontairement. Dans ces conditions, la gauche du PS et les frondeurs ont montré leurs limites ce soir-là. Je le dis sans malice car je suis bien conscient que Benoît Hamon ne les représente pas formellement. La gauche du PS, c’est surtout Emmanuel Maurel. Quant aux « frondeurs », ils vont de Pascal Cherki à Jean Marc Germain en passant par Christian Paul. Des parlementaires sans ces paquets de mandats qui font les vrais seigneurs du PS. Hamon voulait se mettre en position de les représenter tous à la fois dans cette émission. Ambition légitime pour laquelle il n’est pas le plus mal placé. Mais le prix à payer pour occuper cette position est celui de toute ambiguïté assumée : on ne peut en sortir qu’à ses dépens et sans retour. Ce n’était pas le jour visiblement. Il fut donc cotonneux, techno et chaloupant toute la soirée.

A l’inverse, Cécile Duflot avait adopté un autre style plus libre et allant. Elle le pouvait du fait de son choix de rupture avant même le commencement de l’épisode Valls. Dès lors, la présence de Cécile Duflot, du fait de son évolution depuis la sortie du gouvernement jusqu’à aujourd’hui, offrait une opportunité spectaculaire. On pouvait faire constater la convergence non seulement des points de vue mais aussi des références communes à l’écologie politique. Comme elle était à l’aise et la plus performante sur ce plateau, la bonne volonté réciproque pouvait se donner libre cours sans blocage égotique. Certes, convergences n’est pas accord. Mais cette soirée marque une étape incontestable dans le rapprochement avec les Verts. Il est tout à fait évident pour moi qu’elle agissait très consciemment en affichant sa connivence avec moi. Donc, la menace de scission fulminée par Jean Vincent Placé est sans effet sur elle. Sans doute parce que l’intéressé est hors d’état de faire davantage que d’en parler. Comme disent dorénavant les entourages : « ce ne serait pas une scission, juste une démission ».

Mais au total, faute d’avoir respecté son projet, l’émission a surtout vécu en dehors des clous. Car le duo Saint Cricq et Lenglet, loin de vouloir faire exposer la pensée de chacun sur l’alternative, a passé son temps à l’habituel exercice de démolissage en mode « ce que vous proposez, que je résume d’une façon caricaturale, est inepte ». Dans ces conditions les bons moments de télé étaient hors du dérouleur prévu. C’est celui où le futur président de la CGPME, dont Pujadas avait « oublié » de dire qu’il l’était, demandait le droit de faire travailler les apprentis comme des ouvriers « ordinaires » inclus la nuit et les dimanches. Et le sommet de tout fut atteint avec cette député allemande, caricature de « boche » de bande dessinée avec cette phrase d’anthologie où elle déclare : « che n’ai pas bien kompris qu’est-ce que fou foulez faire sinon fou couper les chéfeux entre fous ! ». Du Jacques Villeret dans le rôle d’Apfelstrudel de « Papy fait de la Résistance » ! En moins drôle et même très glacial ! Dès le lendemain, je n’ai plus compté les gens qui m’ont arrêté dans la rue pour me féliciter d’avoir « bien répondu à l’Allemande ». Ce qui m’en apprend beaucoup sur ce que pense notre peuple.

François Lenglet, la dette et moi

La dette publique était l’argument massue, pourtant sans surprise, prévu par monsieur Lenglet pour abattre mon programme. Une fois de plus, il s’est pris les pieds dans le tapis pour n’avoir pas étudié nos arguments, mais seulement la caricature qu’il s’en fait. Du coup, François Lenglet choisit comme technique d’embrouiller le débat au point de le rendre incompréhensible. La dette « depuis quand est-elle illégitime ? De laquelle parlez-vous ? ». Cela revenait à me demander de lui dire quels titres de la dette, de quelle année et pour quel montant étaient visés ! Même une encyclopédie ne peut répondre instantanément à ce genre de colle à deux balles. J’aurais pu dire ce que je voulais, lui non plus n’aurait pu vérifier. C’est le style de François Lenglet : il veut impressionner en se donnant une apparence d’omniscience qu’il est bien loin d’avoir. La confusion qui règne dans ses propres livres, où il défend une chose et son contraire d’un chapitre à l’autre, en atteste. Tout est dans l’apparence : transformer une discussion en une sorte de grand oral de l’ENA. Il débarque donc avec ses graphiques souvent bien bidouillés, dont il n’a informé personne avant et dont il fait semblant que cela représente des évidences que tout le monde devrait connaître. La plupart du temps il est impossible de saisir sur le champ où est la faille du graphique sauf à le connaître d’avance, ce qui m’est arrivé déjà. Ici, il en fut de même une fois de plus. Un de mes commentateurs l’a noté. « Je voudrais apporter une précision, écrit-il,  sur le chiffre donné dans l'émission pour le vote FN chez les ouvriers, qui était de 43%. Par ailleurs, il y avait une erreur sur ce graphique qui a échappé aux fast-checkers, puisque dans cette catégorie, l'abstention s'est montée à 65% des inscrits (données Ipsos-Steria), et non à 54% (moyenne nationale) comme indiqué. Au final, le vote FN a donc concerné 15,05% de l'électorat ouvrier, et même moins, puisque l'Insee estime qu'il y a près de 15% de non-inscrits dans la catégorie. » Une fois de plus, les sondages et les graphes montrent ce qu’ils sont :  un subterfuge du parti médiatique favorable aux Le Pen.

J’ai quand même réussi à dérouler quelques-uns de mes arguments. Mais je suis bien conscient que ce fut dans un tel chaos que c’était assez largement difficile à suivre. Je pense que c’était le but recherché : m’empêcher de décrire ma vision du problème de la relance économique. Non pour des raisons politiques mais parce que François Lenglet ne saurait quoi dire en contre. Et cela pour une raison bien simple : lui-même écrit qu’il faut « euthanasier » les rentiers ! Mais le but de l’émission n’est pas de me « servir les plats » comme ils disent. Il s’agit de montrer que les journalistes sont omniscients et clouent le bec à tout le monde. Peine perdue avec moi, bien sûr. Mais quel regret de ne pouvoir jamais aller au bout d’une démonstration et d’être tout le temps interrompu. J’ai lu dans le Nouvel Obs que je n’étais pas crédible dans mes arguments. Je mets au défi que quelqu’un parvienne à l’être dans de telles conditions. Mais le reste de la démonstration dans le « Nouvel Obs » m’a aussi ouvert les yeux. La soirée était en effet construite comme un vrai passe plat pour la seconde partie et son thème sur la droitisation de la société. Quand nous avons été invités, nous ne savions pas que ce serait la suite de l’émission. On saura à l’avenir en tenir compte. Mais on ne doit pas perdre de vue que cette émission est la dernière émission politique qui subsiste sur la télé de grande audience à une heure de grande audience. On cherchera en vain l’équivalent sur TF1 !

Je veux donc ici, au calme devant mon clavier qui ne me coupe pas la parole toutes les deux secondes, présenter mes arguments dans leur enchaînement. En premier lieu, je vais rappeler ce que disait notre programme « L’humain d’abord » : « Nous agirons pour le réaménagement négocié des dettes publiques, l’échelonnement des remboursements, la baisse des taux d’intérêts les concernant et leur annulation partielle. Nous exigerons des moratoires et des audits sous contrôle citoyen. » Cet audit, c’est-à-dire l’analyse du contenu de la dette a été réalisé par un collectifs d’associations et de personnalités. Le Collectif pour un audit citoyen de la dette publique a rendu le 27 mai 2014 un premier rapport. Il s’est essentiellement intéressé à la dette de l’Etat. Il estime qu’au total 59% de la dette publique actuelle sont « illégitimes ». Cette illégitimité  provient du fait que le montant de la dette résulte des cadeaux fiscaux et des taux d’intérêts excessifs payés par l’Etat. Cette part illégitime de la dette atteint 1 077 milliards d’euros soit 53% du PIB. Si l’État n’avait pas réduit ses recettes et choyé les marchés financiers, la dette publique n’aurait représenté en 2012 que 43% du PIB au lieu de 90%.

Voici la démonstration. La hausse de la dette de l’Etat ne peut s’expliquer par la hausse des dépenses de l’Etat car celles-ci ont reculé de 2 points de PIB en 30 ans. Par contre, 488 milliards d’euros de dette proviennent des cadeaux fiscaux consentis aux plus riches et aux actionnaires. La part des recettes de l’Etat dans le PIB a chuté de 5 points en 30 ans. Si l’Etat avait conservé ses recettes au même niveau, la dette publique serait inférieure de 24 points de PIB à ce qu’elle est ! Voilà pour la part d’illégitimité due à la diminution des recettes de l’Etat et de son appauvrissement volontaire. Voyons à présent la part due aux coûts excessif des marchés financiers. En effet, 589 milliards d’euros de dette proviennent des taux d’intérêts excessifs imposés par les marchés financiers. Le collectif a considéré qu’un taux « normal » aurait été de 2% au-dessus de l’inflation (taux d’intérêt réel). Dès lors, les taux pratiqués au-delà ont été « excessifs ». Démonstration à l’inverse : si l’Etat avait emprunté à des taux d’intérêts non excessifs, la dette publique serait inférieure de 29 points de PIB ! Bien sûr, ces taux d’intérêts excessifs ont eu un « effet boule de neige ». Il a fallu emprunter davantage pour rembourser les emprunts « excessivement » taxés quand ils sont arrivés à terme. Et ces nouveaux emprunts se sont fait souvent à des taux eux-mêmes « excessifs » qui ont renforcé l’illégitimité de la somme due. Voilà ce que l’on appelle une dette illégitime. François Lenglet fait le malin : « depuis quand ? ». Comme si c’était une preuve nécessaire de la valeur de l’argument. Imaginez : il aurait fallu avoir à l’esprit l’histoire de chaque emprunt du trésor public à mesure que la dette contractée pour rembourser de la dette s’est accrue. Voilà le genre de savoir que François Lenglet fait semblant d’avoir, quoiqu’il ne puisse l’avoir, et qu’il somme ses interlocuteurs de prouver.  

A présent, voyons ce qu’il en est de la dette française elle-même en 2014. Assez de baratin avec les « générations futures » endettées par nos mauvaises habitudes ! La durée de vie moyenne des titres de dette est de 7 ans et 19 jours. L’honnêteté pour évaluer sérieusement la situation voudrait qu’on rapporte la dette à ce qu’il faudrait payer si on devait la rembourser en fin de course. C’est-à-dire 1 985 milliards d’euros de dette publique totale divisé par 2567 jours : cela fait 282, 24 milliards d’euros par an ! Soit à peine 13 % du Pib annuel ! On est loin des 93,6% agités sans cesse pour affoler le monde ! Car il est stupide de rapporter toute la dette à la valeur d’une seule année de production. Pourquoi le fait-on ? C’est d’autant plus absurde que le remboursement de la dette n’est pas exigible dans ce délai ! Il donc est absurde de comparer un stock pluriannuel à un flux annuel. C’est pourtant ce qui se fait à longueur de catéchismes médiatiques.

Une autre comparaison indispensable est de rapporter la dette aux avoirs du pays ! Combien le pays possède-t-il ? C’est important pour savoir s’il a « les reins » solide face à la somme qu’il emprunte. Voyons les chiffres. Les avoirs de la France s’élèvent à 35 000 milliards de « patrimoine économique ». Cette somme contient deux composantes. D’une part 13 900 milliards d'actifs non financiers c’est-à-dire des immeubles, des logements, des machines et ainsi de suite. Et d’autre part le pays possède 21 000 milliards d'actifs financiers. Au total, la dette ne représente donc que 5,6% des avoirs de notre pays. C’est-à-dire rien. Ou presque !

On me met régulièrement au défi à propos de l’annulation de la dette. Jean marc Ayrault lui-même s’était indigné : « Mélenchon propose de ne pas rembourser la dette, ce n’est pas sérieux ! » Outre que je n’ai jamais dit les choses de cette façon, je veux bien regarder de plus près cette hypothèse de travail très intéressante. Ce ne serait pas une première dans l’Histoire. Nos chers amis allemands le savent bien. Annuler la dette publique, l’Allemagne l’a fait ! Pour mémoire, ce fut le 27 Février 1953 ! La Conférence de Londres, réunie pour tirer d’affaire l’Allemagne vaincue et détruite, décida l’annulation de près des deux tiers de la dette allemande (62,6%) par ses créanciers étrangers ! L’accord a été signé par la RFA et 22 pays créanciers. Et parmi les 22 créanciers généreux, on trouve les États-Unis, la Grande Bretagne, la France, mais aussi la Grèce ! On ne peut pas dire que la reconnaissance étouffe les Allemands. Pourtant, l’addition était salée. La dette allemande d’avant-guerre a été réduite de 22,6 milliards à 7,5 milliards de Marks. Et celle d’après-guerre de 16,2 milliards à 7 milliards de Marks. Valeur de l’époque. Faites les multiplications pour trouver ce que ces montants veulent dire à présent ! Quand à l’ardoise des dégâts allemands, on l’a remise aux peuples qui ont reconstruits leur pays ! En lisant ces arguments vous constatez quelle extrême retenue fut la mienne face à l’odieuse député de la droite allemande qui nous parlait si mal sur ce plateau de télévision ! 

Qu’en est-il aujourd’hui de la dette de pays étranglés par les méthodes comptables de  l’Europe Allemande ? Le cas d’école est celui de la dette grecque. Selon les calculs du FMI cités par Le Figaro, le bilan est ridicule. Le montant de la dette grecque, début 2010, avant les plans d'austérité qui devait « sauver » le pays, était de 298 milliards. Après six ans d’austérité, le plan de sauvetage s’est élevé à 350 milliards, entre remise de dette, rééchelonnement et nouveaux crédits. 110 milliards de 1er plan de sauvetage de 2010, 140 milliards de nouveau plan 2012 en cours d'application, 100 milliards de dettes annulées par les banques. Je reviens dans un instant sur ces « annulations ». Restons-en aux comptes globaux. On connaît la solution proposée par le Front de Gauche : que la BCE prête directement à la Grèce pour éponger sa dette. Si on l’avait fait au début, on aurait donc déjà économisé 42 milliards ! Et la Grèce n’aurait pas été martyrisée comme l’a été et comme elle l’est chaque jour sous l’administration allemande de la troïka présente à Athènes. Et maintenant, apprenez ceci que beaucoup d’entre vous ignorent. Quand une banque achète des titres de dette elle ne les range pas dans son coffre. Elle les revend ou les intègre dans des fonds de placement. Les titres de dettes grecs ont été revendus jusqu’à 25 % seulement de leur valeur faciale. La valeur faciale, c’est celle qui est marquée sur le titre. Un titre de dette de cent euros a donc pu être vendu jusqu’à 25 euros seulement à mesure qu’il circulait de main en main. En cous de cycle, une banque a pu racheter 25 euros un titre et le revendre à la banque centrale européenne qui lui achetait 30 ou 50. A chaque tour de piste du même titre, les banques se sont gavées. Et maintenant, ces titres sont dans le bilan de la Banque centrale européenne. Laquelle encaisse les intérêts et réclame le remboursement à la valeur faciale, acheté 25 et exigé à 100, comme un vulgaire fonds vautour.

Cette comédie se vérifie pour chacun des plans de sauvetage décidés depuis 2010, pour l’Irlande, l’Espagne, le Portugal et l’Italie. 1 100 milliards d'euros ont été dépensés sur ce mode ubuesque soit l'équivalent d’une année de production de l'Espagne ! Et pendant ce temps, pendant que les peuples étaient saignés, les rentiers en toute impunité pouvaient continuer à sortir leurs capitaux du circuit économique national. Entre juin 2011 et juin 2012 en Italie, 235 milliards se sont enfuis, soit 15 % du PIB et, en Espagne, 296 sont sortis sans laisser d’adresse, soit 27 % de la production annuelle du pays ! C’est tout ça que je voulais mettre sur la table dans la discussion sur la dette. Mais les façons médiatiques rendent ça impossibles. Et tout cela pour poser toujours les mêmes questions, réciter toujours les mêmes couplets, couper la parole et commenter des graphiques pipeautés. 

M6R.FR : lancement du réseau citoyen «Nous le Peuple»

Le Mouvement pour la 6e République a trois mois. Plus de 70 000 signataires sont enregistrés à ce jour. Une petite équipe bénévole et jeune l’anime pour l’instant, c’est a dire veille a son développement, lis les commentaires, assume toutes les tâches techniques et organise la participation de ceux qui veulent apporter une aide concrète. Comme chacun l’a compris au fil de mes interventions sur le sujet ici sur ce blog, ce mouvement est une expérimentation en matière d’auto-organisation. Peu d’observateurs semblent s’en soucier. Honnêtement, je ne m’en plains pas. J’avais annoncé que pour chaque sorte de questions qui se pose, on trouverait une réponse complète et efficace grâce aux outils de l’internet. Ici, nous passons à l’acte. Une agora numérique, baptisée « Nous le Peuple », va s’ouvrir mercredi 10 décembre à partir de 10h30. Il s’agit d’une expérience inédite puisqu’elle permet l’implication constante et directe des citoyens dans les débats et les décisions, en temps réel. Surtout elle rend possible l’auto-organisation du débat lui-même.

«Nous le Peuple» est une plateforme participative construite de manière horizontale et transparente. Elle est construite par les membres du mouvement lui-même. Ce sont en effet des développeurs volontaires qui ont proposé leur aide via le site m6r.fr. Ils ont travaillé en coordination pour créer cet outil et le mettre au service de tous. En conformité avec les principes politiques du mouvement, le logiciel utilisé est un logiciel libre et gratuit, accessible à tous. Nous ne dépendons donc d’aucune source captive.

Bien sûr, chacun pourra participer aux débats. Mais ce n’est pas tout. Chacun pourra aussi proposer des sujets de débat ! Et même soumettre des propositions au vote. On votera pour choisir les sujets de discussion. Et on votera aussi à partir de chaque débat sur les choix à effectuer. Les votes apparaîtront en temps réel au fur et à mesure de la participation de chacun.

Les signataires pourront aussi proposer des actions à mener, des projets à financer : un rassemblement, une campagne thématique, de l’achat de matériel par exemple. Ce qui sera jugé pertinents par les votes de tous apparaîtront en « une » du site. Chacun alors pourra participer à leur financement, proposer de l’aide. Ainsi trouvons-nous une mise en pratique permettant au mouvement de s’auto-organiser de manière horizontale. Je ne sais pas quelle audience ces méthodes vont trouver. Selon moi, ce sont les pratiques de l’avenir. Mais peut-être les esprits n’y sont-ils pas prêts. Nous verrons.

Mon objectif est qu’à terme rapproché, disons le début de l’année prochaine, la machine à organiser les rencontres locales soit disponible. En effet, on me demande souvent de transmettre les fichiers de signatures ici ou là pour organiser des réunions. Cette remise serait illégale. Par contre, on connaît déjà des plateformes de rencontres. On peut donc reproduire l’esprit et la méthode pour se mettre en relation de manière directe avec les autres inscrits proches géographiquement. Le M6R se construit en avançant. Il s'agit d'un processus. Nous créons ensemble un mouvement nouveau par sa nature et son fonctionnement. Si parfois cela tâtonne, c'est que nous sommes collectivement sur la bonne voie, celle du renouveau.


154 commentaires à “Stopper la reculade au point Macron”
» Flux RSS des commentaires de cet article
  1. julie dit :

    Dans le débat sur RTL, à l'opposé de l'image que l'on veut montrer de Jean-Luc Mélenchon si souvent, c'est lui qui a apporté un ton apaisé, rappelle les déchirements de la société française à travers l'histoire. Je pense qu'il ne faut cesser de la rappeler à tout moment et personne ne le fait mieux que lui.
    Dommage que la partie sur l'Europe a été écourtée. Cependant une réflexion, le changement d'orientation ne peut pas se résumer à remplacer la prédominance allemande par celle de la France. Donc ou bien le modèle est à revoir complètement en revenant vers un système coopératif d'états-nations, ou bien on prône l’intégration renforcée de quelques uns, ou bien on accepte le leadership du plus fort du moment. Mais cette dernière option n'est correspond pas au modèle tel qu'écrit sur le papier, de partenaires à droits et voix égales. Qu'on le veuille ou non, le débat sur notre place et rôle au sein de l'Europe reste prioritaire, y compris pour la VIème.

  2. Pierre Pifpoche dit :

    Débat entre JL Mélenchon et Eric Zemmour. Il est curieux et étonnant que, à l'image, E Zemmour soit bien, copieusement et avantageusement éclairé, et JL Mélenchon dans une ombre grise et blafarde. Sans doute une coïncidence accidentelle et regrettable, je suppose !

  3. yves dit :

    Pour les petits camarades qui s'effarouchent du traitement de Jean-Luc dans les médias je me permet un petit conseil. Lorsque vous êtes dans une manif, plutôt que de vous précipiter vers les micros et caméras qui vous sont tendus entartez la tronche de celui qui vous tend le micro. Une seule tarte à la crème suffit et le résultat est spectaculaire. Cela s'apelle un attentat pâtissier, mis au goût du jour par Noël Godin (allez voir son site) et voir BHL entarté est chaque fois un plaisir dont je ne me lasse pas. Seul l'humour déplace les montagnes.

  4. Nedellec dit :

    Bonsoir,
    De qui se moquent t-ils ? Tous les problèmes des Européens et notamment des Français viennent des banques. Et ce gouvernement demande à un banquier de redresser l'économie de la France, tout en sachant que se sont précisément les banquiers qui ont mis le pays dans ce marasme économique. C'est un gouvernement de collabos, il détruit le peuple au nom du profits des actionnaires et des sociétés du CAC. Attention à la révolution !


Blog basé sur Wordpress © 2009/2015 INFO Service - V3 Archive