16fév 06

 

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Les
Les "Missions" : l'accès à la santé, à l'éducation et au travail pour tous

VISITES DANS LES "MISSIONS" : QUAND LA SOLIDARITE FAIT RECULER LE LIBERALISME DANS LES TETES ET LES COEURS

 

Cette journée a été totalement exténuante. Si la matinée a été remplie d'émotions et d'informations précieuses, l'après-midi a tourné au cauchemar avec les demandes de rendez-vous inopinées, les alertes de ceux qui croyaient que des rendez-vous étaient acquis et qui découvraient qu'ils avaient oublié de les confirmer et enfin ceux qui ont décommandé à l'ultime dernier moment sans crier gare, faisant perdre leur temps et leur énergie pour rien à tous ceux qui se trouvaient impliqués en cascade par ce chaos inexplicable. Des heures et des heures perdues en aller-retours, créant pour les nôtres qui avaient tout préparé avec soin depuis plus de quinze jours l'impression déprimante d'une pagaille désinvolte et donc d'une faible fiabilité des interlocuteurs. Cependant ce n'est pas ce que je retiendrai quelle que soit l'exaspération que je ressens et l'inquiétude que cela m'inspire également dans la mesure où cela met en cause des personnes dont je partage bon nombre des objectifs politiques.

Le temps fort de cette journée c'est le passage dans les structures de base du processus politique en cours ici. Il s'agit de celles qui prennent en charge les " missions ", structures et plans d'action de développement de types les plus divers. Celles que j'ai visitées se situaient dans un quartier pauvre crucial. Tour à tour j'ai visité une unité de réinsertion des chômeurs de très longue durée, une coopérative de couture, un dispensaire général et un marché de type épicerie sociale comme nous les connaissons chez nous dans les villes de gauche. Là-dessus s'est ajouté de façon imprévue mais très stimulante deux visites dans des structures situées chez l'habitant et engagées dans un travail d'aide encore plus avancé dans les zones de pauvreté extrême. Là, c'était une cuisine populaire où l'on prépare 150 repas par jour pour les enfants sans nourriture, les personnes âgées seules, les pauvres absolus. Cette cuisine est faite par cinq femmes (partout je n'ai vu pour l'essentiel et quasi-totalité que des femmes) dans une toute petite maison au bord de la route au coeur du quartier. Puis je suis allé voir au débotté la femme qui est un des membres les plus actifs du comité de quartier et elle m'a reçu en même temps qu'elle bavardait avec une autre activiste du comité dans sa maison de sept mètres carré. Je pense que samedi j'aurai le temps et l'énergie de regrouper toutes mes notes, et notamment celles que j'ai laissées en suspens en les mentionnant au fil de mon récit, en ce qui concerne les formes de l'action de base du processus politique. Pour le moment je ne retiens que ceci. La caractéristique essentielle des gens avec qui j'ai parlé, sans guide officiel ni interprète et souvent au hasard de mes déambulations, est qu'ils se savent détestés par les puissants et les riches qui les méprisent d'une part et que d'autre part le pouvoir du président actuel non seulement ne les méprise pas mais qu'il réclame d'eux et qu'enfin ils reçoivent effectivement de l'aide directement du gouvernement pour la première fois de leur vie. Cette aide est visible et concrète. Cela ne signifie pas qu'ils soient sans esprit critique ni contestation y compris contre tel ou tel comportement des gouvernants. J'ai donc retrouvé en grandeur réelle la description de l'apparence contradictoire du soutien populaire tel que me l'avait décrit le vice président José Vicente Rangel. Mais j'ai aussi constaté une autre dimension de l'action qui ne correspond pas aux normes que nous mettons en avant dans nos débats et critiques politiques en temps ordinaire, spécialement en Europe et parmi les catégories socialement favorisées qui fournissent les gros bataillons des directions politiques de nos partis progressistes. Toutes les personnes que j'ai rencontrées ne se sont jamais contentées de faire des comparaisons et des observations concernant leur situation matérielle et celle de leur famille avant et après la nouvelle République. Tous, je dis bien tous, ont invoqué ou se sont référés en permanence à des valeurs morales comme finalité de leur action. Il a sans cesse été question de respect dû à soi (je le mentionne distinctement par ce que cela me semble le mériter) et aux autres, d'agir en vue de donner de l'affection et même d'agir avec affection et ainsi de suite. Il faut se figurer que tout cela est dit et revendiqué dans un environnement social extrême où toutes les tares et déchéances qui accompagnent le dénuement quasi absolu et la frustration permanente constituent le fond de scène de la vie quotidienne la plus intime. Ce constat m'a électrisé dans la mesure où il me conforte dans l'idée qu'un processus de transformation sociale et politique d'un pays et particulièrement s'il est de nature révolutionnaire en faveur des humbles, ne peut être seulement limité aux conquêtes matérielles qui doivent nécessairement être accomplie. Pour moi il est vrai qu'à titre individuel comme collectif les personnes doivent aussi reconstruire leur système de valeurs et codes comportementaux personnels pour chasser le libéralisme de leur coeur et de leurs nerfs. C'est-à-dire chasser la mentalité pourrie qui lui sert de meilleur vecteur : le consumérisme, inclus le consumérisme politique, la compétition comme valeur centrale, le goût de dominer, l'indifférence aux autres et aussi l'indifférencialisme moral. Ainsi, il y a bien une forme de spiritualité de l'action socialiste au sens où elle peut se présenter à ses protagonistes à la fois comme une mise en harmonie personnelle avec l'affirmation de la solidarité avec l'humanité universelle et comme un acte de reconstruction de soi. Je ne sais pas si j'ai sur-le-champ trouvé les mots qui décrivaient le mieux ce que j'ai entendu et ressenti mais je sais que cela m'a suffisamment marqué pour que je me sente tenu d'en faire davantage que ce récit dans la suite de mes combats.

Pour une obscure raison technique je ne parviens pas à transmettre encore les photos avec lesquelles je fixe pour moi les traits de ce que je vois concernant les personnes que je rencontre et les situations que leur action illustre. Le moment venu quand la grande tuyauterie du web voudra bien accomplir cette bonne manière, on les rajoutera en marge de mes récits. Si je le mentionne c'est parce qu'il me semble que les visages et les tenues en disent aussi beaucoup sur ce dont je viens de parler. En quittant les femmes du comité, elles m'ont offert le premier rafraîchissement de la matinée et il était déjà plus de treize heures. L'eau était dans un broc et elle se purifiait avec un morceau de charbon. Elles s'en sont excusées parce qu'il n'y a pas d'eau courante potable là. J'ai dit j'avais quand même un peu de crainte. Je l'ai bu en même temps que les autres buvaient et je n'ai jamais autant compris ce que voulait dire partager.


Aucun commentaire à “Quatrième journée au Venezuela”
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  1. Fred. de L. dit :

    Clap! clap! clap!

  2. marie mandrin du vaucluse dit :

    le sens du mot partage ici prend toute sa dimension,bravo,bravo,de me faire partager de tels moments.....je t'embrasse,Marie

  3. Michel du Var dit :

    Jean-Luc merci.Quelle bouffée de bonheur.Nous progressons là non seulement vers une République Sociale mais vers une République Universelle.Liberté durement acquise,difficile à vivre, mais exemplaire.Egalité dans le partage du minimum. Fraternité comme ciment de la société. Quand nous en serons tous là, le monde sera sauvé. Nul besoin de croyance quand on aura atteint cette morale universelle. Rêvons,le rêve permet de poursuivre le combat sans sombrer dans le désespoir.

  4. magali dit :

    Waouh...encore merci

  5. cecile dit :

    impressionnant ! Ca fait du bien de voir que certains y croient ! Bravo pour eux

  6. Christine et Didier dit :

    Des amis communs t'invitent à consommer de la poudre de liane pour mieux affronter la fatigue. Ils ont bien raison du conseil. Il faut qu'il te reste assez d'énergie chaque soir pour que tu nous rafraichisses d'une plume alerte et vivace, des actes et des faits qui, même loin, nous confortent dans le choix pugnace de l'égalité et de la fraternité, terreau de la morale universelle toujous à recommencer. Venceremos !

  7. Christian LEMASSON dit :

    Eh oui, les associations sont les premiers opposants à l'ultra libéralisme et le gouvernement français l'a bien compris qui réduit les subventions particulièrement dans les banlieues et les quartiers où la population la plus fragile est en "rétention".

    Ton voyage et, d'une manière générale, tes réactions quasi quotidiennes (quelle pêche!) sont un aliment qui devient indispensable à notre action. Prends quand même soin de toi...

    J'attends avec impatience notre rencontre nationale à Montreuil en avril prochain.

    Christian

  8. paysan bio dit :

    "Tous, je dis bien tous, ont invoqué ou se sont référés en permanence à des valeurs morales comme finalité de leur action. Il a sans cesse été question de respect dû à soi et aux autres, d'agir en vue de donner de l'affection et même d'agir avec affection et ainsi de suite."

    dites ça s'appelle pas faire de la politique et vivre avec son coeur?

    révolutionnaire ça?

    ou dernière solution avant la révolution?

    pascal


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